Eutelsat, pilier de la souveraineté numérique européenne face à Starlink
Alors que l’Europe cherche à affirmer son indépendance technologique face aux géants américains, le groupe Eutelsat, spécialiste des télécommunications par satellite, s’apprête à changer de direction. Un nouveau dirigeant prendra bientôt les rênes de l’entreprise avec un objectif ambitieux: garantir la souveraineté numérique du continent. Décryptage. Née de la fusion entre la société française Eutelsat et la Britannique OneWeb en 2023, l’entreprise est aujourd’hui un acteur central dans le domaine des télécommunications spatiales. Elle dispose de plus de 600 satellites en orbite basse et de 35 en orbite géostationnaire. L’objectif: permettre l’accès à un réseau numérique, internet ou téléphonique, via l’espace.Mais dans ce secteur stratégique, difficile d’ignorer la présence écrasante de Starlink, la constellation de satellites du milliardaire américain Elon Musk. Elle compte déjà 7 000 satellites, soit dix fois plus qu’Eutelsat. Malgré cet écart, le groupe européen reste un acteur sérieux, capable de rivaliser, à condition de relever plusieurs défis majeurs.À lire aussiL'Europe affine sa stratégie pour retrouver le chemin de l'espaceUn redressement financier nécessaire pour affronter la concurrenceLe nouveau dirigeant aura une mission délicate, remettre Eutelsat sur les rails d’une stabilité financière. Le groupe affiche une dette de 2,7 milliards d’euros, aggravée par la fusion avec OneWeb. En parallèle, il doit investir plus de 4 milliards d’euros pour moderniser sa flotte de satellites et participer au projet IRIS², l’équivalent européen de Starlink, prévu pour 2030 avec 288 satellites supplémentaires. Pour faire face, Eutelsat a déjà vendu certains actifs et réduit ses investissements annuels. Pourtant, les agences de notation, comme Fitch, s’inquiètent de la solidité financière de l’entreprise, ce qui met davantage de pression sur sa stratégie de développement.Une alternative crédible mais des défis techniques et économiquesEutelsat est aujourd’hui le seul acteur européen capable de proposer une véritable alternative à Starlink, que ce soit pour les particuliers, les entreprises ou même les armées. Mais pour rester compétitif, il faudra aussi baisser les coûts. Là où un terminal Starlink coûte environ 589 dollars, celui d’Eutelsat est estimé à 10 000 dollars. Et la compétition ne fait que commencer. Amazon vient d’entrer dans la course avec sa constellation Kuiper, dont les premiers satellites ont été mis en orbite la semaine dernière. La Chine, elle aussi, accélère ses projets spatiaux.Si l’Europe veut préserver sa souveraineté numérique, elle devra investir massivement dans ces technologies stratégiques et soutenir des acteurs comme Eutelsat, qui incarnent l’avenir de l’indépendance technologique du continent.